Certains parlent d’assurance-chômage, le gouvernement l’appelle assurance emploi. Est-ce bien la même chose? Théoriquement, il s’agit bien du même programme. Nommé assurance-chômage jusqu’au milieu des années 1990, ce programme canadien a été remplacé par le régime d’assurance emploi à la suite d’une importante réforme. Ce changement de nom n’est toutefois pas innocent. Il est le résultat d’un renversement profond de philosophie!
Le chômage est vu comme un problème de responsabilité collective et l’assurance-chômage deviendra un pilier de l’État-providence alors en construction
C’est en 1940 que le programme d’assurance-chômage voit le jour. Bien qu’imparfaite, la loi d’assurance-chômage constitue à l’époque l’une des plus importantes lois sociales canadiennes. Au cours des années qui suivront, le programme se développera pour connaitre son apogée avec la réforme de 1971, année où le régime est universalisé, s’adressant à 96 % de la population active. Au cours de cette période, l’État considère qu’il a un rôle de promotion économique à jouer. Le chômage est vu comme un problème de responsabilité collective et l’assurance-chômage deviendra un pilier de l’État-providence alors en construction.
À partir du milieu des années 1970, on assiste à l’arrivée en force de la pensée néolibérale, selon laquelle les questions d’emploi relèvent du secteur privé. Dans cette perspective, l’interventionnisme de l’État est remis en question et la gestion du chômage doit s’insérer dans une logique de libre marché. Les chômeurs et chômeuses sont maintenant identifiés comme responsables de leur situation. Trois vagues de réformes viendront réduire l’accessibilité au régime.
Les différentes réformes imposées au cours des années 1990 viennent conforter l’orientation promarché prise par le gouvernement fédéral. La Loi C-12 (1996) instituant le régime d’assurance-emploi constitue pour plusieurs un point décisif. C’est la fin de l’universalité en tant que philosophie de base. Pour le gouvernement de l’époque, le régime est trop généreux, n’incitant pas suffisamment les chômeurs et chômeuses à réintégrer le marché du travail.
Selon cette logique, « l’assurance-chômage crée le chômage » Aujourd’hui, moins de 40 % des sans-emploi touchent des prestations d’assurance-chômage.
Les diverses modifications apportées au régime au cours des années 1990 le rendent moins accessible, moins généreux, plus répressif. Le nombre de personnes susceptibles d’être admissibles diminue drastiquement, en raison, entre autres, d’un nouveau mode de calcul du temps de travail nécessaire pour se qualifier aux prestations. Aujourd’hui, moins de 40 % des sans-emploi touchent des prestations d’assurance-chômage.
Ces changements ne sont pas sans conséquences sociales. On assiste à l’appauvrissement d’une main-d’œuvre déjà victime de la précarisation du marché du travail. Plus globalement, les restrictions au régime s’attaquent à tous les sans-emploi et se traduisent par un recours accru à l’aide de dernier recours.
Si, à l’origine, le programme d’assurance-chômage assumait un rôle de prévention de la pauvreté, le passage à l’assurance-emploi y a bel et bien mis fin. Aujourd’hui, plusieurs groupes militent pour une plus grande accessibilité et une bonification du programme. Nous y reviendrons dans un prochain texte.
N’attendez pas d’arriver au bout de vos prestations pour commencer votre recherche d’emploi. Venez rencontrer un conseiller dès maintenant!
Si vous avez des questions précises concernant vos prestations d’assurance-emploi ou votre admissibilité au programme, communiquez avec le Mouvement Action Chômage ou le Comité chômage de Montréal.
Émilie Laurin Dansereau
Conseillère en développement de carrière