Trouver un emploi qu’on aime quand on arrive au Québec, ce n’est pas toujours évident. C’est encore plus complexe quand notre domaine est aussi large que le français. Cette semaine, faites la connaissance de Joël Brami. Il vous parle des défis professionnels qu’il a rencontrés à son arrivée au Québec et des stratégies qu’il a mises en place pour les surmonter.
Je suis rédacteur de sous-titres pour les malentendants. J’écoute les émissions et je transcris les dialogues. Je fais ce qu’on appelle du Pop On, c’est-à-dire que je prépare les sous-titres pour que les malentendants puissent lire ce qui est dit. Je dois aussi noter les bruits intéressants et les onomatopées. Il faut transcrire fidèlement tout ce que les personnages disent. On ne fait pas de composition. Parfois, il faut ajuster un peu les mots pour que ça fonctionne. C’est donc important de très bien connaître l’orthographe et la syntaxe.
Je pourrais organiser mon expérience autour de trois métiers:
Ces trois expériences différentes m’ont servi dans le métier que j’occupe actuellement. De mon passé de traducteur, j’ai pris l’habitude de travailler rapidement, avec des exigences de productivité élevée. Avoir été rédacteur technique m’a fait acquérir une capacité à rechercher des informations (le nombre d’informations pas très claires débitées dans une émission est vraiment impressionnant). Enfin, le métier de formateur m’a permis de comprendre de manière poussée le fonctionnement de la langue et ses pièges, d’avoir des automatismes, ce qui s’avère décisif lorsque l’on doit écrire énormément en un temps limité.
En définitive, je dirais que mon domaine, c’est le français. C’est vraiment ce qui est commun aux trois branches de mon parcours professionnel.
Est-ce que ça correspond à mon objectif professionnel? Je ne sais pas. Je n’ai pas vraiment de plan de carrière défini. Je suis quelqu’un qui croit beaucoup aux opportunités.
Par contre, ça correspond à mon objectif de vie. Au départ, quand je suis arrivé au Québec, j’étais formateur de français. C’est comme ça que je me définissais. Ensuite, j’ai eu une petite expérience comme rédacteur technique. J’ai détesté ça. Sous-titreur, je n’avais jamais pensé à ça. Maintenant que je suis ici, mes objectifs sont différents. Je suis au Québec, je veux m’intégrer. Dans ce contexte, être sous-titreur, c’est bien. Ça me permet de faire tout ce que je veux. Mon but, c’est vraiment de m’installer. Pour l’instant, c’est ce que je fais. Plus tard, quelque chose d’autre viendra peut-être. Je n’ai pas vraiment d’objectifs de travail. Pour moi, il n’y a pas de voie tracée. Il y a plutôt des cheminements.
Pour me mettre en action! Après avoir perdu mon travail, je n’étais pas déprimé. Je me sentais libre pour la première fois de ma vie. Pour la première fois de ma vie, je me retrouvais sans attaches, que ce soit en France ou ici. Aucune obligation. Pas d’école, pas de travail. En plus, ici, tout était nouveau pour moi. Je connaissais beaucoup moins de choses, je faisais beaucoup de découvertes. Après quelque temps, j’ai eu une période de découragement. J’aurais pu faire ma recherche par moi-même, mais je n’avais pas envie de souffrir! J’avais besoin de structure, d’être piqué avec une aiguille pour être plus motivé!
Un peu plus d’un mois. Ma recherche a commencé au CREMCV. Comme je le disais, pendant la période qui a suivi la perte de mon emploi, j’ai pris le temps de profiter des choses. Je ne me sentais pas pressé. J’ai passé trois semaines au Club et j’ai trouvé un travail deux ou trois semaines après avoir terminé.
Ne pas rester dans des carcans. Mon domaine, le français, le permet. S’ouvrir. Et ne pas avoir honte. Je pense que bien des Français n’auraient pas le réflexe d’aller faire un Club de recherche d’emploi. Ils pourraient se dire qu’ils n’ont pas besoin de ça. Pour moi, c’est important de ne pas avoir d’a priori sur ce qu’on doit faire ou pas. Il faut se donner des opportunités et croire en sa bonne étoile. Ne pas hésiter à profiter des trois semaines pour explorer.
Une personne pointilleuse pour qui l’erreur est importante. Quelqu’un avec une grande capacité de concentration. Comme c’est un travail très spécifique, c’est plus compliqué de trouver la bonne personne. Il y a énormément de règles à respecter pour faciliter la vie des malentendants. Il faut rédiger les sous-titres de manière à ce qu’ils comprennent, qui les dit et à quel moment. Il faut donc avoir la capacité de se mettre à leur place. C’est pourquoi je dirais que l’empathie est une qualité importante à avoir aussi. C’est quelque chose que j’avais développé dans mon métier de formateur et qui m’aide.
J’ai trouvé mon emploi sur Internet, sur un site spécialisé en communication. J’ai fait aussi des appels qui n’ont pas donné de résultats concrets dans l’immédiat. Mais ça m’a donné des idées pour plus tard. Ce n’est pas perdu.
Je pourrais en nommer deux. D’abord, l’inertie. J’ai souvent eu de la chance dans mes recherches d’emploi. Je n’ai jamais été longtemps en arrêt. J’avais donc besoin d’aide pour me mettre en action.
Ensuite, ma plus grande difficulté résidait sans doute dans le fait d’avoir un domaine qui n’en est pas vraiment un. La voie logique aurait été de continuer en tant que formateur de français, mais c’était un peu compliqué. Alors je me questionnais beaucoup sur ce que j’allais faire. Rédacteur, ça ne marchait pas trop. Traducteur, c’est un milieu où il y a trop de stress. On se prend trop la tête. Formateur, c’est mon métier de cœur, mais je ne pouvais pas l’envisager, car ça m’aurait demandé de suivre un vrai parcours du combatttant, à commencer par la recconnaissance de mes diplômes. Alors je me demandais vraiment ce que j’allais faire.
C’est là que les appels ont servi. J’ai frappé plein de murs. Je crois vraiment en la vertu des échecs. Si je n’en avais pas eu, je n’aurais jamais pensé à aller sur Internet voir les offres. J’aurais peut-être moins ouvert mon esprit. Aller au Club, ça m’a aidé. Avoir quelqu’un qui t’accompagne, c’est encourageant. Il y avait une belle ambiance. Tu frappes des murs, mais avec le sourire. Ça m’a donné l’énergie de continuer.
Émilie Laurin Dansereau
Conseillère en employabilité