Dernièrement, je lisais un sondage maison réalisé par l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, concernant l’utilisation de tests psychométriques lors de l’embauche (sondage). Quelle ne fut pas ma surprise d’y lire que 72,78 % des répondants utilisaient de tels tests lors du processus d’embauche! Il existe une panoplie de tests psychologiques ou psychométriques. Dans les milieux de travail, on en utilise différents types: test d’habileté, test d’aptitude incluant les tests d’intelligence, test d’intérêt ou d’orientation professionnelle, test de personnalité. De plus en plus utilisés, ces tests font un véritable retour en force. Pourquoi?
De nos jours, engager un employé coûte très cher. Selon Yvan-Marcel Boily, président de ProfileSoft, une petite entreprise qui a développé des outils de sélection et de développement professionnel, en comptant tous les frais impliqués (de la publicité à l’intégration du nouvel employé), l’embauche d’une personne coûterait en moyenne 10 000 $ à l’entreprise. Et c’est sans compter les coûts (financiers et symboliques) associés à un congédiement. C’est pourquoi de plus en plus d’employeurs utilisent ces tests qui, avec le semblant d’objectivité qui les entoure, leur donnent l’impression d’avoir moins de chance de se tromper.
Dans le même sondage du CRHA, plus de 15% des répondants indiquent que leur entreprise a déjà fait l’objet de plaintes ou de poursuites à la suite de l’utilisation de tests psychométriques. Déjà, en 1998, la Commission des droits de la personne rédigeait un rapport sur la question. Selon elle, le recours à des tests de personnalité en milieu de travail est suspect, tant en regard du droit à l’égalité que des droits fondamentaux. On pense ici au droit à l’intégrité de la personne et au droit au respect de sa vie privée. Quel est le problème avec les tests psychologiques?
Les arguments contre ces tests sont de plusieurs ordres :
D’abord, ces tests obligent souvent le candidat à répondre à des questions très personnelles et, donc, à dévoiler des aspects de sa vie privée qui ne sont pas directement liés au travail et qui ne concernent pas l’employeur.
Ensuite, les tests psychométriques peuvent être une source de discrimination. Par exemple, selon les questions, un recruteur pourrait percevoir dans les résultats du test d’un candidat, des traits se rapprochant de l’anxiété, de la paranoïa, de la dépression, etc. Tous ces traits sont couverts par la notion de handicap de la Charte des droits de la personne. La Commission a d’ailleurs remarqué que certains tests psychologiques avaient pour effet d’exclure de façon disproportionnée des candidats sur la base de critères illicites de discrimination.
Finalement, une autre critique souvent adressée aux tests psychologiques est qu’ils sont complexes à analyser et que la grande majorité des recruteurs n’ont pas les compétences pour bien les interpréter. C’est pourquoi plusieurs recommandent que les employeurs aient recours à une firme externe de psychologues industriels lorsqu’ils veulent faire passer un test psychologique à un candidat. Cette façon de faire réduirait également le caractère intrusif de ces tests. L’employeur recevrait seulement les conclusions du test sous forme de rapport et non toutes les réponses. Ainsi, personne dans l’entreprise ne saurait, par exemple, que le candidat fait des cauchemars trois fois par semaine.
Plusieurs remettent en question la pertinence de ces tests en indiquant qu’une personnalité est quelque chose de difficile à cerner. Il n’est pas si aisé d’en catégoriser les aspects pour ensuite les mesurer. À ce jour, aucune étude n’a démontré que les tests psychométriques amènent des réponses particulières reliées aux exigences d’un poste précis qu’il n’aurait pas été possible d’obtenir autrement.
De plus, la personnalité d’un individu n’est pas quelque chose de défini de manière fixe. Elle peut changer selon l’environnement de travail, le contexte social dans lequel il se trouve ou d’autres facteurs de sa vie personnelle. Et c’est sans compter que dans le cadre d’une entrevue d’embauche, un candidat aura tendance à réagir à un énoncé, non selon ce qu’il pense vraiment, mais plutôt en fonction de ce qu’il croit être le plus acceptable pour l’employeur. Sachant cela, pourquoi accorder autant d’importance à la « personnalité » d’un candidat par rapport à d’autres facteurs tels que sa formation, son expérience ou sa motivation?
Malgré toutes leurs limites, plusieurs entreprises continuent d’utiliser les tests psychométriques lors de leurs processus d’embauche. En avez-vous déjà passés? Qu’en avez-vous pensé? N’hésitez pas à partager avec moi vos expériences entourant les tests psychométriques et on se retrouve dans un mois pour le dernier article de la série sur l’enquête pré-embauche. Il portera sur le casier judiciaire.
Émilie Laurin Dansereau
Consultante en employabilité